Volontariat au Cambodge : mon expérience

Faire une mission humanitaire faisait partie de ma bucket list depuis peu. Même s'il n'est pas nécessaire de partir au bout du monde pour aider autrui - de nombreuses personnes ont besoin de soutien et des associations existent près de chez nous - l'idée de découvrir en même temps une autre culture m'a intéressée. Quand, en mars dernier, j'ai aperçu une affiche au sujet d'une réunion d'information, j'ai sauté sur l'occasion.

L'association, c'est Coup de Pouce Humanitaire, fondée en 2001 par des volontaires souhaitant contribuer à des actions sur le long terme. Elle a noué des partenariats avec des associations locales en Amérique du Sud, Afrique et Asie afin de soutenir plusieurs causes. Celle qui m'a particulièrement touchée est l'accès à l'éducation au Cambodge.

Le Cambodge comprend plus de 15 millions d'habitants. Il y a quarante ans, les Khmers rouges ont pris le pouvoir afin d'assurer l'égalité de chacun. Cela sous-entendait pour eux : migrer les populations des villes vers les campagnes, éliminer les élites et détruire les écoles. Je ne rentrerai pas plus en détails sur les crimes révoltants commis par ce groupement d'individus, car vous trouverez de meilleures informations ici. A l'heure actuelle, le pays est en reconstruction et des écoles poussent partout. Il y a peu de collèges car l'éducation est gratuite jusqu'à l'âge de 9 ans ; les enfants sont ensuite amenés à retourner dans les rizières.



Le projet de construction d'un collège dans un village au centre du Cambodge m'a tout de suite touchée. A la fois par la symbolique, le caractère utile, mais aussi le fait d'être au contact d'enfants. J'ai le désir profond d'être mère un jour, fascinée par l'ingéniosité, l'énergie, la bonne humeur et l'insouciance des enfants.

Mon expérience en mission humanitaire


Avant : découverte, excitation et appréhension

Avant de partir, nous avons réalisé deux réunions d'information où nous avons découvert les autres membres de l'équipe. Sur 11 personnes, la plupart venant de région parisienne, il y avait deux couples et un duo - que je formais avec une amie ; nous n'étions donc pas tous des inconnus les uns pour les autres. C'était drôle d'observer ces visages que nous allions connaître par coeur quelques mois plus tard.

Ces réunions ont permis d'en apprendre plus sur les associations sur place, l'histoire des projets - une précédente école avait déjà été conçue sur le même lieu il y a trois ans -, le chef de mission et l'ensemble de l'équipe. Les rôles de chacun ont ainsi pu être distribués : responsable de la pharmacie, de la kermesse, des outils, des photographies, des visas, etc. L'implication de chaque membre était essentielle pour créer cet esprit d'équipe.



De mon côté, j'étais à la fois heureuse de pouvoir contribuer à un tel projet, excitée à l'idée de voyager pour la première fois en Asie, mais aussi soucieuse. J'appréhendais la vie communauté avec 9 personnes que je ne connaissais pas, le manque d'intimité, la nourriture, les conditions de vie rudimentaires (que je développerai dans la suite de l'article), l'absence d'électricité et d'eau courante, le travail pénible sous la chaleur (il allait faire 35 degrés), les maladies (notamment le paludisme et les problèmes gastriques), les blessures sur le chantier (là-bas, pas de protection de sécurité), les insectes (notamment les mygales et les moustiques), le manque de réseau pour communiquer avec mes proches... Je me sentais idiote mais j'avais peur.

Pendant : dur labeur, partage et bonne humeur

La mission de 2 semaines s'est découpée entre 10 jours de chantiers et un week-end de visite des temples - dont je vous parlerai dans un prochain article. Ici, je me concentrerai sur ces 10 jours de travail.

Après presque 24 heures de voyage, vols et bus compris, nous sommes arrivés à Stoung (c'est ici). Nous étions en janvier, alors qu'il neigeait en France, ici, une chaleur étouffante nous a envahi. J'ai été fascinée par ces maisons, tantôt en tôle, tantôt en bois, qui défilaient tout au long du trajet. Ici, sur le terrain de l'école, le premier bâtiment était déjà construit, le second ne comportait que ses fondations (la dalle et les piliers en béton) : il y avait du boulot !

Nous avons été reçus comme des rois, les cambodgiens étant très hospitaliers, chaleureux et respectueux.

Je parlais de conditions rudimentaires un peu plus haut, c'était finalement mieux que ce à quoi nous nous attendions. Une salle de classe avait été réquisitionnée comme dortoir, les garçons d'un côté, les filles de l'autre. Nous dormions sur des matelas en mousse, tous munis de moustiquaires. Une salle de douche avait été construite rien que pour nous : une citerne de récupération d'eau de pluie pour nous rincer, quelques bâches pour nous mettre à l'abri des regards, et une ampoule pour prendre notre douche après 18h - la tombée de la nuit. Il y avait des toilettes - chose peu commune dans le village, dont l'une nous était réservée. Quelques animaux en ont d'ailleurs fait leur abris, comme plusieurs mygales inoffensives et un caméléon ; que nous avons découvert avec surprise de nuit, munis de nos lampes frontales. Un groupe électrogène avait été installé au cas où nous ayons besoin d'électricité. Nous étions finalement ravis de vivre de la même manière que la plupart des habitants du village, et au plus proche des ouvriers, qui vivaient un peu plus loin sur le même terrain.


Chaque jour, nous nous levions à 6 heures du matin, pour travailler de 7h à 11h, puis de 14h à 18h. Plusieurs tâches nous étaient dédiées durant ces deux semaines : montage des armures pour le béton, bêchage de la terre pour faire le terrassement, briques à poser pour constituer les murs, sacs de ciment à porter pour les enduire, seaux de béton à soulever pour finir les fondations... Sous 35°C, même s'il était parfois difficile de travailler, nous redoublions d'effort pour faire avancer ce projet le plus rapidement possible. Notre chef de chantier parlait quelques mots d'anglais, ce qui nous a beaucoup aidé pour mieux comprendre ce que nous devions faire et comment ; les ouvriers étaient également bienveillants en nous expliquant avec des gestes.

Deux fois par jour, un représentant de l'association locale, francophone, appelait notre chef de mission afin de savoir comment cela se passait, si nous avions besoin de quoi que ce soit, mais aussi de favoriser les échanges avec le personnel de l'école et du chantier. C'était très rassurant de le savoir à nos côtés et pratique pour mieux nous faire comprendre.


L'un d'entre nous était responsable chaque matin d'accompagner la professeure d'anglais, afin de faire le marché. Là-bas, nous y avons vu de nombreux fruits et légumes frais, de la viande séchant au soleil, des insectes grillés, et bien d'autres choses sur lesquelles nous avons fermé les yeux ; les règles d'hygiène et de conservation des aliments n'étant évidemment pas les mêmes ici que chez nous.

Le midi, comme le soir, une cuisinière nous préparait à manger. Et à chaque fois, quels que soient les ingrédients choisis, le repas était bon mais avait la même saveur. Cela nous a d'abord ennuyé puis beaucoup fait rire. Loin de moi l'idée de critiquer ses talents de cuisinière et sa bonne volonté, bien évidemment nous lui étions très reconnaissants. Nous avons juste compris que ce n'était pas des aliments qu'elle avait l'habitude de cuisiner, et avons su par la suite nouer un dialogue gestuel avec elle pour diversifier les goûts. Toutefois, manger dans un restaurant gastronomique le week end était juste un pur plaisir pour mes papilles ! :)

Vous avez pu le comprendre en lisant mes mots, la barrière de la langue fut très frustrante durant ces 15 jours. De notre côté, nous avions appris quelques mots en khmer (bonjour, merci, au revoir, très bien, comment ça va) ; de leur côté, certains connaissaient quelques mots en anglais. Nous avons pu cependant communiquer grâce à la gestuelle, malgré quelques quiproquos qui nous ont beaucoup fait rire par la suite. 



Cette barrière ne nous a pas empêché de partager des moments forts avec l'ensemble des personnes sur place, que ce soit le Directeur de l'école, les professeurs, les ouvriers ou bien les enfants. Nous avons, par exemple, pu donner des cours aux enfants pendant 2 heures, préparer avec eux des gâteaux de riz dans la cour, jouer au volley et au basket, danser sur des musiques traditionnelles khmers comme sur des musiques plus modernes, partager des saucissons et des bières avec les ouvriers, assister à une procession bouddhiste de 6 heures (oui, vous avez bien lu :)) dans le village pour ramener de l'argent aux moines, entendre les chants de bonheur et de prière des mariages aux alentours, et bien d'autres choses encore... Nous avons été heureux de partager le quotidien de ce village durant cette mission.

Sans compter les liens que nous avons tissé avec les 9 autres membres de l'équipe. J'ai eu la chance de me retrouver avec des personnes exceptionnelles, avec qui nous partagions les mêmes valeurs, le même humour, le même esprit d'équipe et la même bienveillance. Nous avons beaucoup ri et nous nous sommes énormément soutenu dans les différentes épreuves.


Le plus difficile, ça a été le départ. Nous pensions pouvoir nous échapper un samedi matin, presque sans dire adieu. Et puis, tout le monde nous attendait devant l'école. Le Directeur nous a remercié par un discours émouvant, les professeurs nous ont embrassé chaleureusement, les enfants se sont mis en haie d'honneur afin de nous accompagner vers nos tuk tuk... Et de grosses larmes ont coulé sur mes joues en disant au revoir - adieu - ces petites filles et ces petits gars avec qui nous avions tant rigolé. Des dizaines d'entre eux se sont précipités vers moi en me prenant dans leur bras, et je les ai serrés très fort.

Après : joie, nostalgie et nouvelle vision du monde

Cela fait quelques semaines désormais que je suis rentrée en France. Le retour a été difficile : vague de froid en France (40°C de différence avec le Cambodge), décalage horaire (6 heures), reprise du travail... Mais bénéfique. Quel plaisir de retrouver mon intimité, mon petit chez moi, avec une douche chaude, un lit confortable, de l'électricité, du réseau ! Quel bonheur de retrouver mes proches, qui m'avaient tant manqué.

Et puis, j'ai visionné toutes mes photos, toutes celles de mes nouveaux amis, et la nostalgie m'a envahi. Les rires des enfants, les sourires des ouvriers, la voix du chef de chantier, les Chol moï du Directeur de l'école, la musique khmère, les blagues de mes acolytes... m'ont manqué. Cette liberté de ne pas avoir son téléphone toujours dans la main. Ce silence sans voiture en continu. Ce paysage de rizières asséchées à perte de vue. Ce soleil.


J'ai gardé contact avec certains enfants, professeurs et chef de chantier qui ont internet, mais également avec l'ensemble de l'équipe, avec qui nous parlons quotidiennement. Nous avons d'ailleurs déjà prévu de passer un week end ensemble en juin. :)

Ce voyage m'a fait réaliser plusieurs choses : 

  • Sur la gratitude : nous sommes extrêmement chanceux d'avoir le confort dont nous disposons, et nous devons en être reconnaissant ; ce n'est pas un dû.
  • Sur la bienveillance : elle devrait être la clé entre tous les êtres humains ; quelle que soit leur origine, leur âge, leur sexe, leur rôle dans la société.
  • Sur la générosité : ce sont bien ceux qui en ont le moins qui en donne le plus.
  • Sur le bonheur : l'argent ne fait effectivement pas le bonheur, ce sont les moments d'échange qui nous enrichissent et nous font grandir.
  • Sur la communication : la langue facilite les échanges mais un regard en dit bien plus long. Et les gestes permettent de partager tellement de choses.
  • Sur l'écologie : les pays en voie de développement ne sont pas sensibilisés au traitement des déchets et au recyclage : les déchets plastiques sont partout au Cambodge. La prise de conscience dans nos pays doit prendre plus d'ampleur. Je veux, plus que jamais, réduire mes déchets au maximum.

Cette expérience a été très enrichissante pour moi. Il s'agit là d'un des plus beaux voyages de ma vie, duquel je retiens surtout les rencontres et les paysages. J'espère retourner à Stoung un jour, et je ne suis pas sûre de retenter l'expérience ailleurs, mais j'en garde des souvenirs qui seront à jamais gravés dans ma mémoire.

J'espère que mon témoignage vous aura plu et vous aura éventuellement donner envie de sauter le pas pour partir, vous aussi, en mission. Si vous avez des remarques ou des questions en particulier, n'hésitez pas à répondre en commentaires, je me ferai un plaisir d'y répondre :)

Et vous, êtes-vous déjà parti en mission humanitaire ? Je serais curieuse de connaître votre expérience !

CONVERSATION

3 petits mots:

  1. J’ai toujours eu envie de visiter le Cambodge, mais y aller dans le cadre d'un volontariat ne m’a jamais traversé l’esprit. Pour le moment, je vois si je peux partir en Asie dans les mois à venir. J’ai utilisé une calculette crédit sur https://www.sofinco.fr/simulation-credit.htm pour vérifier si je peux entreprendre un tel projet. Votre article m’a cependant réellement plu. J’ai bien aimé voir votre ressenti et votre expérience par rapport à cette aventure.

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    1. Bonjour Johanna,
      Le Cambodge est un pays très intéressant :) Pour information : partir via un voyage humanitaire nécessite un certain montant (environ 1200 € pour ce voyage en toute transparence), dont 60% est soumis à une défiscalisation, car est considéré comme un don à l'association avec laquelle je suis partie, dans le cadre d'une oeuvre caritative. Ca peut donc être avantageux financièrement si le projet t'intéresse (beaucoup plus que de faire un crédit !). Tu peux jeter un oeil ici pour les questions financières : https://www.impots.gouv.fr/portail/particulier/questions/jai-fait-des-dons-une-association-que-puis-je-deduire
      Pour ce qu'il s'agit de l'association, voici là où tu peux trouver des informations : http://www.cdepouce.com/
      Belle soirée à toi !

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    2. Ah, c'est plutôt intéressant, merci bien ! :-) Je jetterai un oeil à ces sites.

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Bonjour,
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